nos jours heureux.
LONDRES, ANGLETERRE. une lettre posée sur le bar de la cuisine, c'est tout ce qu'elle a laissé de son passage dans la capitale londonienne. sur le papier, des traces de larmes, une écriture tremblante, des mots lourds de sens. elle ne reviendra pas. l'homme tourne la tête vers la chambre de ces deux petits êtres qui dorment, loin de toute cette tristesse, loin de cette situation sans queue ni tête. les petites filles ne se réveilleront pas avant une petite heure encore. l'homme a pris une claque, il ne s'attendait pas à ça. il prend sa tête entre ses mains, se demandant comment il va pouvoir s'en sortir. il se dirige vers la chambre de ses filles et s'appuie sur le montant de la porte, regardant ses deux petits anges qui dorment à point fermé. des jumelles. braeden et birdy. le fruit de son amour pour cette femme qui l'avait suivi jusqu'en angleterre et dont il ne restait plus rien aujourd'hui. elles ont à peine six mois. elles ne méritent pas ça. l'homme referme lentement la porte de la chambre et attrape le téléphone. il appelle sa mère, au bord des larmes. elle sera là dans deux heures. elle l'aidera comme elle a toujours aidé ses enfants. elle a le temps et encore le courage de s'occuper de deux enfants de plus. elle aime son fils plus que tout au monde alors elle ne le laissera pas tomber. et puis, il en va de la vie de deux petits bouts de filles alors il est hors de question de les priver d'amour. elle était à l'heure. les filles s'étaient réveillées, l'homme les tenait dans ses bras. ses yeux étaient remplis d'amour lorsqu'il les regardait mais il était clairement dépassé par les évènements. sa mère l'a réconforté et est tombée amoureuse des deux petites filles rousses. elle s'est promis de s'en occuper comme si elles étaient ses filles et elle l'a fait. l'homme a finit ses études et est devenu l'avocat qu'il aspirait à être. les filles n'ont jamais manqué de rien. famille fortunée, gâtées à souhait. grandir n'était pas si difficile que cela. on les connait, on se retourne sur leur passage. elles en jettent, il n'y a pas à dire. et puis, il faut dire que leur nom de famille, elles le portent avec fierté. turner. braeden et birdy turner n'ont jamais connu leur mère mais elles ont toujours eu l'amour maternel dont elles avaient besoin. elles avaient leur grand-mère, c'était suffisant. on les surnommait les terreur. elles étaient appelées queen b et baby b dès leur plus jeune âge. braeden, plus vieille d'un petit quart d'heure, avec un caractère de merde et pourtant une telle aisance, c'était elle la reine du duo. birdy, elle, suivait sa soeur à la trace mais était beaucoup plus douce. le jour et la nuit, le soleil et la lune. toujours ensemble, elles ne se séparaient jamais. et puis, pendant ces vacances d'été, les choses ont changé.
CORAL BAY RESORT, CAIRNS, AUSTRALIE. « papa ? tu nous expliques ? » pour une fois, ce n'est pas moi qui me tient devant mon père, le regard froid, les bras croisés sur la poitrine. légèrement en retrait, c'est bridy qui mène la danse. un peu plus tôt, on était tombées sur cette photo. birdy s'est fait un film immédiatement. j'ai pourtant essayé de lui dire que ce n'était rien mais elle n'a pas voulu me croire. elle a arraché la photo du mur et est partie comme une furie vers notre bungalow. papa avait le nez dans le travail. je me suis toujours demandé s'il serait capable de vivre sans son travail ou si les vacances en australie n'étaient qu'un prétexte pour avoir plus de temps pour s'occuper de ses dossiers en attente.
« les filles je - » il s'est figé. je l'ai entendu déglutir avec toute la difficulté possible, birdy avait touché une corde sensible. tout de suite, la situation a piqué ma curiosité. j'ai penché ma tête sur le côté, plissé les yeux et posé les mains sur mes hanches.
« c'est quand tu veux papa. » froide et cassante, il nous cachait quelque chose et cette photo en était la clé. birdy était tendue, elle serait les dents. je sentais qu'elle avait peur d'avoir raison. mon père a posé son stylo et s'est passé les mains sur le visage. il nous devait une explication et il allait nous la donner, il n'avait pas le choix, il le savait.
« cette femme a représenté une grande partie de ma vie. je l'ai aimé, profondément. et puis, un jour, elle est partie, sans se retourner. c'est du passé. » je sentais toute la détresse dans la voix de mon père. je voulais arrêter de le torturer parce que oui, c'était de la torture. mais, ma jumelle, elle, n'était pas du même avis.
« ne me dis pas que c'est - » « birdy ! » « non b ! on a le droit de savoir. on a dix-huit ans papa, on est assez grandes maintenant alors arrête de tourner autour du pot et crache le morceau ! » je n'avais jamais vu ma soeur dans un état pareil. je ne supportais pas de voir mon père dans l'embarras et pourtant, devant la détermination et la rage de ma moitié, je ne pouvais pas faire grand chose. je savais que birdy avait du mal à vivre avec l'absence d'une mère. j'ai pourtant tout essayé pour lui prouver le contraire, en vain. aujourd'hui, elle était à deux doigts d'avoir une réponse.
« elle s'appelle jade. c'est ici que je l'ai rencontré. nous avons partagé plusieurs années ensemble et, suite à notre histoire, elle a donné naissance aux deux choses les plus importantes dans ma vie : vous. » ma bouche s'est ouverte en grand. j'étais sur le cul. cette femme d'une beauté sans pareille, c'est ma mère ?! d'accord, je crois que j'ai besoin de prendre l'air. cela dit, mes jambes refusent d'obéir à mes ordres et je me retrouve plantée là, incapable de bouger. birdy, elle, tremble de colère. je vois des larmes dévaler ses joues et elle quitte la pièce en un rien de temps. merde. mon père baisse la tête. je n'arrive plus à respirer. les yeux de mon géniteur se posent sur moi, je referme la bouche et laisse mes bras retomber le long de mon corps. merde. j'entends la porte du bungalow claquer. il faut que je rattrape ma soeur, elle a besoin de moi, je le sais. cela dit, je ne peux pas non plus laisser mon père en plan.
« dis quelque chose brae', je t'en prie ... » la détresse se fait ressentir dans la voix de mon père. je baisse la tête. cette fois-ci, je ne peux prendre sa défense. je dois rattraper ma soeur, elle a besoin de moi. d'un signe de tête, il me montre la porte. il a compris. pour la première fois de ma vie, je me retrouve à ne pas savoir quoi dire. moi qui ai, d'ordinaire, la réponse à tout, je n'arrive pas à trouver les mots. c'est donc avec une boule au ventre que je quitte le bungalow à grandes enjambées afin de retrouver ma moitié. elle a besoin de moi, je le sais, je le sens.
LONDRES, ANGLETERRE. deux ans. deux longues années se sont écoulées depuis que papa nous a annoncé la nouvelle. je ne peux pas nier l'évidence : je me suis pris une grande claque dans la gueule quand j'ai appris. j'ai alors compris beaucoup de choses. j'ai compris pourquoi il ne parlait jamais de notre mère et qu'il changeait de sujet à chaque fois. j'ai compris pourquoi il n'y avait pas de photo d'elle à la maison. j'ai compris pourquoi elle n'existait pas dans la famille et qu'on préférait nous dire qu'elle s'était éteinte. j'ai compris pourquoi papa travaillait autant. j'ai compris pourquoi ma grand-mère s'investissait à ce point dans les causes perdues. nous étions passées par là, nous aussi. nous avions été des causes perdues. birdy n'a pas adressé la parole à papa pendant un mois après ça. je devais faire le messager, ce qui m'a grandement gonflé, je dois bien l'avouer. alors j'ai fini par les envoyer bouler, tous les deux. j'ai consolé ma moitié tous les soirs après ça. elle en faisait des cauchemars. et puis, un jours, mon père nous a expliqué son histoire, notre histoire. birdy a pleuré. j'étais énervée. j'avais la rage contre cette femme qui avait promis monts et merveilles à mon père et qui nous avait finalement abandonné, tous les trois. jamais je n'aurais pensé que la femme que papa nous décrivait aurait pu être ce genre de personne. je m'étais trompée. cette femme ne méritait même pas que l'on cherche à savoir ce qu'elle était devenue. je refusais d'avoir quelque chose à faire avec elle. je me jurais que si jamais elle refaisait surface et qu'elle essayait de nous contacter, je lui expliquerais ma façon de penser. birdy, elle, n'a pas du tout la même vision des choses. enfin, si, mais c'est différent. ma jumelle compte bien retrouver notre génitrice pour lui dire d'aller se faire foutre, droit dans les yeux. elle en a fait son obsession. parfois, elle me fait peur avec cette histoire, on dirait une psychopathe comme dans les séries policières. mais je l'aime toujours autant parce qu'elle est ma soeur et qu'au fond, je la comprends mieux que quiconque. alors, quand, ce jour-là, elle m'a annoncé qu'elle partait s'installer au cbr pour retrouver notre mère, j'ai vu rouge.
« de toute façon, j'irais. avec ou sans toi b. j'ai fait mes valises, j'ai réservé mon billet. j'me tire et rien ni personne ne pourra me faire changer d'avis. » ma soeur devenait folle quand on parlait de jade. il y a bien une chose que l'on ne peut pas nous retirer, à nous, les soeurs turner : c'est notre détermination. je savais que, quoi que je dise et quoi que je fasse, elle partirait quand même. je le sais, nous sommes jumelles.
« tu crois sérieusement que je vais te laisser y aller toute seule ? plutôt crever que d'être loin de toi baby b. » il n'y a vraiment qu'avec elle que je peux être mielleuse et tendre. il n'y a vraiment qu'avec elle que je peux être celle que je suis réellement. ma soeur, c'est mon tout alors je donnerais le meilleur pour elle. uniquement pour elle.
prendre son envol.
CORAL BAY RESORT, CAIRNS, AUSTRALIE. « turner ! » je m'arrête net. je reconnaitrais cette voix entre milles. c'est LUI. merde. je n'ai pas le temps, birdy a besoin de moi. elle se trouve à peine à quelques mètres, c'est comme si c'était une mission pour moi de la rejoindre. hors de question que je me laisse distraire. et puis, de toute façon, il n'est pas une distraction. beaucoup trop sûr de lui, je n'aime pas ça. je passe pourtant mon temps à l'envoyer balader, à un moment donné, il aurait dû abandonner depuis le temps. mais non, il est encore là, à essayer, encore et toujours. je ne sais plus quoi faire à force. alors je lève les yeux au ciel et me retourne vers lui.
« j'ai pas le temps à perdre avec toi mon chou alors de l'air, dégage, lâche moi les baskets, tu m 'gonfles. va voir ailleurs si j'y suis, va jouer au bac à sable avec tous les enfants qui, j'en suis certaine, ont autant de vocabulaire et de maturité que toi. laisse moi respirer, j'en ai besoin. » je plisse les yeux. il doit comprendre maintenant, il le vaudrait mieux sinon je pense que je vais péter un câble. birdy était arrivée à ma hauteur sans que je ne m'en rende compte.
« ce que ma charmante soeur essaye de te dire, c'est qu'on avait rendez-vous et que donc, elle ne peux pas s'occuper de toi pour le moment. mais je te promets que je te la libère au plus vite. » un grand sourire sur les lèvres de la rouquine, un coup d’œil entendu au garçon et celui-ci recule bien qu'il ne semble pas en avoir envie.
« c'était quoi ça ?! b. j'avais pas besoin de toi, ça va, depuis le temps qu'il se prend des vents, il faut bien qu'il comprenne à un moment ou à un autre. et d'ailleurs, je n'ai aucune envie de me retrouver dans la même pièce que lui, c'est quoi c'délire ? t'es tombée sur la tête ou quoi ?! » un sourire en coin se dessine sur les lèvres de ma soeur. je ne sais pas ce qu'elle mijote mais cela ne me dit rien qui vaille.
« qui a parlé de se retrouver dans la même pièce ? et puis, tu sais, je te trouve vachement dure avec lui. ça fait des années qu'on le connait, des années qu'il te court après et des années que tu rigoles à ses vannes pourries en secret. tu devrais lui laisser une chance b. » je sais que ma moitié est fan des causes perdues mais là, quand même, je m'inquiète de son état de santé moral. j'arque un sourcil.
« laisser une chance à ce crétin ? trop peu pour moi, j'ai d'autres chats à fouetter. » birdy secoue la tête, désespérée de mon attitude, surement.
« dis-moi, il se passe un truc avec rafaël ? » je tourne la tête avec violence et détermination vers ma jumelle, les yeux grands écarquillés.
« mais t'es malade ?! da silva ?! certainement pas non ! tu sais bien que je n'aime pas ce genre de type. » je frissonne rien qu'à l'idée d'une éventuelle relation entre nous. d'accord, ce type a un physique parfait et j'avoue même baver dessus. cela dit, niveau caractère et personnalité, sortir ou même coucher avec mon double, trop peu pour moi. birdy semble convaincue mais je sais que le silence qu'elle laisse volontairement s'installer entre nous ne sera pas vain. elle va gonfler avec ce garçon alors autant que je m'y prépare avant qu'une nouvelle vague de questions tordues ne soit posée.
LONDRES, ANGLETERRE. deux ans. deux longues années passées loin de la belle londres. mon père me manquait trop alors j'ai insisté longuement auprès de ma moitié pour passer ces vacances d'été sur le sol anglais. birdy a longtemps râlé mais elle a finit par céder. il faut dire que ses recherches sont au point mort alors j'ai pensé qu'une pause ne lui ferait pas de mal. les choses sont toujours aussi tendues entre mon père et ma soeur. elle ne lui accorde que peu de crédit et lui, il tente désespérément de se racheter auprès de sa fille. leur ballet incessant me donne la nausée. mon père est trop doux avec birdy, il y a longtemps qu'à sa place je lui en aurais collé une. mais elle est comme ça, avec sa bouille d'ange, on est incapable de hausser le ton en sa présence.
« tu crois qu'elle arrivera à me pardonner un jour ? » j'étais assise au coin du feu, près de mon père. encore une soirée que nous avions passé en tête à tête, l'absence de birdy nous assommant un peu plus tous les jours. elle était encore enfermée dans sa chambre, ses écouteurs bien enfoncés dans les oreilles, à attendre sagement que le temps passe.
« je n'en sais rien 'pa. c'est une turner, elle finira par revenir. » un petit sourire en coin et je me suis levée, j'ai déposé un baiser sur le front de mon géniteur et je suis allée me coucher. demain, nous repartirons pour cairns. demain est un autre jour. demain, je retrouverai enfin celle pour qui je donnerai ma vie. demain, birdy redeviendra cette jeune femme brillante et enjouée qu'elle a toujours été.
faire semblant.
CORAL BAY RESORT, CAIRNS, AUSTRALIE. « tu sais ... au fond, mais alors tout au fond, je t'aime bien. » oui, je l'admets, j'avais légèrement, oui, non, carrément, trop bu. je tentais de rentrer au bungalow mais c'était un peu comme le parcours du combattant vu l'état dans lequel je me trouvais. après m'être cassé la figure plus d'une fois, c'était évident que ma connexion avec le sol se fasse dans les escaliers à un moment ou un autre. quel surprise ce fut lorsque des bras familiers ont entouré mon corps avant que mes dents ne laissent une trace sur les marches. c'était lui. encore et toujours lui. ces derniers temps, j'ai l'impression que rien ne va plus. je bois plus que de raison et bien trop souvent. ma soeur passe son temps sur ses recherches ou encore avec lui. traitresse. elle me manque. alors j'avoue noyer son absence dans quelques verres bien dosés. et à chaque fois que je me retrouve dans une situation peu cocasse, il est là.
« t'es surtout franchement loin d'être sobre. » mon dieu mais je rêve ou son sourire en coin est incroyablement sexy. ok. plus jamais je ne bois. restons concentrée, cela vaut mieux.
« hm. touché. » grimace peu glamour, je baisse la tête et me mords la lèvre inférieure.
« pour être honnête, j'te préfère quand t'es bourrée. t'es plus accessible, c'est mieux ... » j'ai ris. et alors, on a discuté. de tout. de rien. à l'heure actuelle, je ne suis pas certaine de me souvenir de tout ce que j'ai pu dire. que dieu me pardonne si jamais j'ai sorti des énormités. et puis, à force de confidence, j'avoue avoir fermé les yeux. juste quelques secondes, pas grand chose. et alors, il m'a relevé avec une délicatesse particulière et m'a porté jusqu'au bungalow. j'ai entendu ma soeur éclater de rire quand elle a ouvert la porte. je me rappelle lui avoir dit que je lui ferai la peau, mais je ne suis pas certaine qu'elle en ai tenu vraiment compte. il m'a posé sur mon lit et a rabattu la couette sur moi avant de quitter la pièce. je crois les avoir entendu discuter pendant un moment, mais ce n'était que des voix bien trop lointaines pour savoir si elles étaient vraiment réelles ou non.
« non mais tu te rends compte de ce que j'ai fait ?! j'suis dingue. plus jamais je ne toucherais un verre de ma vie ! » birdy éclate de rire. j'ai la tête en vrac et les souvenirs de la veille remontent à la surface. je me rappelle avoir confié mes craintes à ce garçon, lui avoir donné des indices sur celle que je suis réellement et ça, ça fait peur.
« tu t'es juste laissée aller b. y a rien de mal à ça tu sais. » je la soupçonne de vouloir me caser avec le crétin et ça, c'est pas bon signe du tout. parce que tout le monde sait que lorsque birdy veut quelque chose, elle l'obtient. et quoi de plus facile pour elle que de faire craquer sa jumelle ? je suis clairement dans la merde à ce niveau là.
« ça fait bien longtemps que j'ai cessé de me laisser aller birdy et ce n'est pas maintenant que je vais recommencer. je n'ai pas le droit de faiblir et tu le sais. je suis une turner sans coeur, j'ai une réputation à tenir. » elle soupire. elle me connait mieux que personne.
« elle est belle la turner sans coeur tiens ! tu ne te rends même pas compte à quel point tu es formidable brae' et, même si je suis très fière d'être la seule capable de le voir, j'te garanti que tu gagnerais tellement en en prenant conscience et en le faisant partager au monde. » je lève les yeux au ciel. ma moitié est trop sentimentale, trop cérébrale. elle m'énerve. je préfère abandonner la partie parce que je sais très bien que, dans mon état, elle est perdue d'avance. je décide d'aller prendre une douche pour me remettre les idées en place et retirer toute la honte que je peux avoir sur moi. je me suis dévoilée à ce type. pourquoi lui, d'abord ? trop de questions qui se bousculent dans ma tête, c'est affreux. une fois remise en forme et avoir passé plus d'une demi heure sous la douche, je ressors de la salle de bain avec une meilleure tête qu'en y rentrant.
« b. t'aurais pas vu- » arrêt sur image. pause. il est là, assis à la table, une tasse de café dans la main. merde. je regarde birdy, incrédule. elle joue à quoi là au juste ? il se lève et me tend la tasse. merde. machinalement, je la prends et je fuis. je vais m'enfermer dans la chambre. j'avale en vitesse ce précieux liquide, attrape ma veste, enfile mes chaussures et je décide de m'enfuir aussi loin que possible du regard de ce garçon.
« b. attends ... » je refuse de me retourner, malgré le ton implorant dans la voix de ma moitié. je claque la porte et avance, d'un pas à la fois décidé et énervé. traitresse.
« brae' attends moi steuplait. » merde. il me court après, encore et toujours. je refuse de ralentir, il en est hors de question. je ressens tellement de choses contradictoires à son égard que je ne peux pas céder à son appel. et pourtant, il finit par me rattraper, posant sa main sur mon épaule. je frissonne et m'arrête finalement.
« écoute moi bien. ce qu'il s'est passé cette nuit, tu l'oublies. tu m'oublies. j'ai dis des choses que je n'aurais jamais dû te dire. et le pire dans tout ça, c'est que je suis incapable de t'en vouloir parce que tu es toi et que je n'arriverais pas à t'en vouloir de faire les choses bien. » wait. j'ai vraiment dit ça ?
« ma soeur est convaincue que tu es quelqu'un de bien et je la crois. mais je ne le suis pas alors c'est une histoire sans fin. il n'y a pas de début à tout ça et probablement pas de fin possible. » je me surpasse moi-même. je continue malgré moi à me dévoiler à lui et je ne comprends pas pourquoi.
« ça fait des années et des années que je te connais brae', des années et des années que j'te vois grandir alors t'as pas le droit de me dire que tu n'es pas quelqu'un de bien. t'as toujours soutenu ta soeur, t'as toujours défendu ton père. tu ne peux pas dire que tu n'es pas quelqu'un de bien, je ne te laisserai pas faire. » il met tellement de conviction dans tout ce qu'il me dit que ça me touche, je ne peux pas le nier. mais je ne peux pas non plus rester. ce serait trop dangereux. je n'ai pas le droit de lâcher prise.
« j'ai besoin d'un verre. » et je fuis, une fois de plus. cette fois-ci, il ne me rattrapera pas. il n'a pas essayé de me rattraper les jours suivants. il était là, mais ce n'était pas comme avant. peut-être que moi aussi, j'ai changé. je ne saurais le dire. je lui ai laissé une porte entrouverte malgré tout, je le sais. ce que j'ignore cependant, c'est si j'ai vraiment envie de la refermer.